mardi 6 novembre 2007

Enseigner la philo et la littérature

Réplique aux textes sur l'enseignement de la littérature et de la philosophie au collégial

Bonjour M. Cornellier,

D'abord, félicitations pour votre livre, Lettre à mes collègues sur l'enseignement de la littérature et de la philosophie au collégial (Nota Bene, 2006), qui lance un débat intéressant. Permettez-moi d'emprunter une perspective divergente de celles utilisées jusqu'à maintenant lorsqu'on aborde la question de l'enseignement de la littérature et de la philosophie. Pour moi, ces deux disciplines ne sont pas différentes des autres matières. J'ai eu des professeurs aussi intéressants en mathématiques et en physique qu'en philosophie et en littérature. J'ai également eu des professeurs inintéressants qui rendaient les cours rébarbatifs dans toutes les disciplines malgré l'engouement des élèves pour la matière.

Maintenant, voici comment j'envisage personnellement l'enseignement de la littérature et de la philosophie. J'ai toujours cru au dynamisme dans l'art de transmettre des connaissances. Pour expliquer une matière, il faut savoir enseigner pour ses élèves. Il faut savoir attirer leur attention, les maintenir dans un état d'écoute et de participation jusqu'à la fin des cours. Plusieurs méthodes permettent d'atteindre ce résultat, dans toutes les disciplines : étonner, donner des exemples connus, raconter des histoires, créer des débats, raconter des blagues, actualiser le contenu, utiliser le jeu, favoriser les échanges, utiliser divers outils pédagogiques, développer la créativité, ne pas hésiter à avoir recours au cinéma, au théâtre et à la musique, bref varier le plus possible les activités d'apprentissage. Toutes les méthodes pédagogiques sont bonnes pourvu qu'elles soient appropriées à la matière enseignée et aux capacités des élèves.

Au collégial, la plupart des élèves âgés de 16 à 19 ans ne lisent jamais autrement qu'à l'école. Il y a des exceptions, mais un professeur s'adresse d'abord et avant tout à la majorité de ses élèves. Au départ, pour remplir sa fonction d'enseignant, il doit viser la réussite de tous les élèves à qui il enseigne. C'est dans la définition même de sa tâche de favoriser l'apprentissage de tous les étudiants qu'il aura sous sa gouverne.

Le seul problème réel dans l'enseignement de la philosophie et de la littérature réside, d'après moi, dans l'idéalisation de la matière enseignée par certains professeurs du collégial qui se prennent quelquefois pour des enseignants universitaires. L'enseignement collégial étant défini comme niveau supérieur, les élèves devraient prendre conscience du degré d'enseignement dans lequel ils s'inscrivent en accédant au collégial, affirment-ils, et ils devraient fournir les efforts nécessaires sans besoin de stimulations. Les professeurs de cégep qui soutiennent cet argument du rang supérieur de l'enseignement collégial se cachent souvent derrière ce paravent pour ne pas avoir à fournir eux-mêmes d'efforts afin de rendre leurs cours intéressants.

Certains enseignants de cégep de philosophie et de littérature prétendent aussi que leur matière recèle en elle-même des vertus pédagogiques qui justifient un enseignement sclérosé. La philosophie et la littérature seraient par elles-mêmes formatrices. Pas besoin d'ajouter des éléments de méthodes pédagogiques qui vont divertir du contenu « ontologiquement » essentiel des matières enseignées.

Toutefois, les professeurs de cégep qui adoptent ces arguments fallacieux ne sont pas légion. Ils enseignent à une minorité; aux élèves les plus doués qui n'ont pas réellement besoin de professeurs pour les stimuler à apprendre. Ils se justifient des hauts taux d'abandons et d'échecs dans leurs cours par des discours abscons sur la pertinence de leur matière et son caractère indispensable et formateur pour le citoyen. Ainsi nimbés d'une nécessité presque sacrée, ces professeurs de philosophie et de littérature deviennent des prêcheurs intouchables.

Cependant, la majorité des professeurs du collégial prennent leur rôle de pédagogues au sérieux et cherchent par tous les moyens à rendre leurs cours captivants même quand leurs disciplines ne sont pas dans l'air du temps. Et ils y parviennent la plupart du temps. Heureusement!

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